Patrimoine • 23 janvier 2023
Vers une maison contre les esclavages et pour l’égalité à Bordeaux ?
L’esclavage, selon l’UNESCO, est l’état ou condition sociale d’un individu sur lequel s’exercent les attributs du droit de propriété ou de certains d’entre eux. Ce phénomène est identifié par la possession ou le contrôle d’un autre individu, sa coercition et la réduction de sa mobilité et par le fait que cette personne ne soit pas libre de partir ou de changer d’employeur.
La traite s’entend comme le commerce d’êtres humains pouvant être échangés contre des marchandises avant leur mise en esclavage.
L’asservissement et la mise en esclavage des populations africaines a commencé bien avant l’arrivée des Européens sur les côtes africaines qui a donné naissance à la traite négrière atlantique. Les historiens identifient ainsi trois principales traites esclavagistes ayant réduit en captivité des populations africaines.
Bordeaux au temps de l’esclavage
Bordeaux était le premier port colonial et troisième port négrier entre le 17ème et le 19ème siècle. Au départ de Bordeaux, pour aller s’emparer d’hommes, femmes et enfants en Afrique et les déporter aux Antilles…
Au 18ème siècle, en faire des esclaves a permis à la ville de s’offrir une partie de ses majestueux hôtels particuliers ! Outre le commerce triangulaire, la ville s’est également enrichie via l’économie de plantation, et le « commerce en droiture ». Celui-ci négocié entre le port de la lune et les colonies d’Amérique.
Un devoir de mémoire bordelais
Le 10 mai 2001, est adoptée une loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité. La loi Taubira est promulguée le 21 mai 2001. Le 10 mai est choisi en 2006 pour célébrer la Journée nationale des mémoires de la traie et de l’esclavage et de leurs abolitions.
Depuis, des références au passé négrier bordelais ont vu le jour. Des plaques explicatives détaillant le passé de célèbres Bordelais ayant participé aux expéditions de la traite négrière ont été installées dans les rues. Une statue de Modeste Testas, femme esclave, a été érigée.
Ces références sont-elles suffisantes pour informer et éduquer sur le sujet ? La réponse est non.
L’association Mémoires & Partages oeuvre pour créer un « centre de ressources contre les esclavages et pour l’égalité ».
Imaginez une maison contre les esclavages
Basée à Bordeaux et à Dakar, l’Association Internationale Mémoires & Partages est coordonnée et animée par Karfa Diallo, fondateur-directeur.
Karfa Diallo est un essayiste, éditorialiste, consultant, écrivain et poète franco-sénégalais.
il est engagé depuis de nombreuses années sur les questions de diversité culturelle et de travail de mémoire, en particulier autour de l’esclavage et de la colonisation. Il a participé à la reconnaissance du passe négrier de la ville de Bordeaux. Karfa Diallo a également obtenu par le Sénégal le vote de la première loi africaine reconnaissant la traite des noirs et l’esclavage comme un crime contre l’humanité.
Le 9 mai 2022, la ville de Bordeaux s’est associée au réseau Mémoires & Partages pour installer une Mission de préfiguration d’un lieu dédié aux mémoires des esclavages et pour l’égalité.
Cette initiative inédite témoigne de l’évolution de la conscience collective sur une question politique majeure qui continue de travailler la société bordelaise à travers des objets patrimoniaux mais aussi des problématiques sociales, sanitaires et culturelles.
La question de la mémoire de l’esclavage est au cœur des sociétés de plusieurs continents (Europe, Afrique, Amérique). Elle permet à la fois une relecture plus équilibrée de l’histoire et le développement d’une société de respect, de tolérance et de l’acceptation de l’autre et de ses différences. Elle est sans aucun doute au cœur de la construction d’une nouvelle relation entre la France, les territoires ultramarins et l’Afrique.
Dans la perspective de la mission assignée aux 28 membres de la mission de préfiguration, une Consultation Citoyenne est ouverte à tous les bordelais et de bordelaises afin de s’imprégner de leurs opinions, leurs attentes et leurs propositions concernant le projet de Maison Contre les Esclavages.
Le Musée Mer Marine est très investi en faveur du devoir de mémoire contre les esclavages. Conscient de son rôle éducatif et citoyen autour des héritages de cette histoire, il invite à un Atelier de la Concertation citoyenne.