Environnement • 13 juillet 2021
L’hydrologue Emma Haziza tire la sonnette d’alarme
Le réchauffement climatique conduit à des modifications importantes de la pluviométrie annuelle dans les différentes régions. À l’occasion d’une conférence organisée par Eau de Paris, Emma Haziza a pris la parole sur les risques et les effets du réchauffement climatique.
Hydrologue française, fondatrice et présidente du centre de recherche Mayane, une structure dédiée au développement de solutions face aux risques climatiques et hydrologique, Emma Hazia, a exprimé ses craintes sur l’avenir.
On est pas dans un scénario de science-fiction
La France connait une quatrième année de sécheresse historique. Malgré des passages pluvieux durant certaines saisons, la France, en 2019, a connu des températures allant jusqu’à 42 degrés à Paris et 46 degrés dans le Gard.
Ces quatre dernières années, durant l’été, il y a eu entre 80 et 90 départements en situation de crise au niveau de leurs masses d’eaux profondes. Pourtant, la France est un climat tempéré, avec des masses d’eaux extrêmement importantes.
La France n’est pas prête
Il devient urgent de préparer les villes à demain, notamment à vivre des épisodes exceptionnels de pluviométrie intense. En effet, plus il existe une masse d’air chaude, plus les épisodes de pluie seront importants. Cela signifie que la France va vivre des épisodes comme les inondations sur la Tinée et la Vésubie en Alpes Maritimes avec deux fois plus de pouvoir précipitant.
Cela signifie aussi des effets de ruissellement urbain colossaux. Or, la France n’est absolument pas prête. La principale problématique non gérée en France est la question du ruissellement urbain pour lesquels il n’existe aucune cartographie à la différence des inondations sur les grands cours d’eau pour lesquels les risques sont à peu près connus.
L’angoisse de la Californie
Lacs à leur plus bas niveau historique, feux de forêts précoces, restrictions d’eau et vague de chaleur record. L’Ouest des État-Unis subit de plein fouet les effets d’une sécheresse chronique.
La Californie est un exemple particulièrement flagrant des conséquences dévastatrices du changement climatique. Grenier des États-Unis, terre d’agriculture intensive, cette région est plus que jamais en péril.
En effet, l’agriculture est la plus grande consommatrice d’eau à l’échelle de la planète avec 93% de l’eau utilisée à des fins agricoles. Or ces sécheresses font craindre une pénurie d’eau imminente. Dans la vallée de Tulare, située au cœur de la Californie, sont cultivés deux tiers des fruits des États-Unis. Par manque d’eau, plusieurs milliers d’arbres ont été arrachés et certains éleveurs ont choisi de réduire leurs troupeaux. Un crève-cœur pour les agriculteurs, même si la sécheresse constatée est liée à leurs cultures intensives.
Aucune maitrise sur les effets domino
Il est important de noter que s’il n’y a plus suffisamment d’eau, l’agriculture va être stoppé, la fabrication de biocarburants va être empêchée et les centrales nucléaires obligées de s’arrêter.
L’année dernière, déjà, certaines centrales nucléaires ont failli être mises à l’arrêt. Elles n’ont tenues que grâce à un soutien d’étiage, c’est-à-dire ce niveau de débit minimum que l’on a dans les rivières, qui a été assurée par de grands opérateurs, ce qui a permis de ne pas arrêter les centrales.
Une majorité de la population est encore persuadée que le changement climatique n’arrive pas avant 2050, que le changement de températures va se ressentir à partir de 2100, et que la fonte des glaciers himalayens n’est pas prévue avant 2350. En réalité, nous avons beaucoup moins de temps et il est nécessaire d’être humble avec la nature, car on ne maîtrise absolument pas les effets domino, parce que la science s’est construite sur des effets de silos.