Économie • 10 décembre 2024
Le requin blanc en Méditerranée : une présence rare et menacée
L’observation récente d’un grand requin blanc près de l’île de Porquerolles, dans le Var, a suscité un vif intérêt. Ce prédateur légendaire, bien que rarement aperçu, est présent dans les eaux méditerranéennes depuis des millénaires. Pourtant, sa population est aujourd’hui extrêmement réduite, classant l’espèce parmi les plus menacées. Cet événement offre l’occasion de faire un bilan historique et précis de la présence du requin blanc en Méditerranée.
Une présence attestée depuis des millions d’années
Le requin blanc (Carcharodon carcharias) a colonisé la Méditerranée il y a environ 3,2 millions d’années, arrivant depuis l’Atlantique par le détroit de Gibraltar. Adaptée à ce nouvel environnement, une population distincte s’y est installée durablement, profitant notamment des riches bancs de thons rouges, qui constituent l’une de ses principales proies.
Des études paléontologiques et génétiques ont confirmé cette présence ancienne, et des fossiles attestent de captures par des pêcheurs dès l’Antiquité. La Méditerranée offrait alors un habitat stable pour ce prédateur.
Recensement des observations à travers le temps
La rareté du requin blanc en Méditerranée n’est pas nouvelle, mais les signalements ont drastiquement diminué au fil des siècles, en raison de la pression humaine sur cet écosystème. Voici un aperçu historique des observations et captures recensées :
Avant le XXe siècle :
- Des récits historiques font état de captures fréquentes, notamment en Italie et en Tunisie. Les requins blancs étaient également observés autour de la Sicile et des îles Baléares.
XXe siècle :
- Les années 1930-1960 représentent une période où les captures accidentelles étaient encore relativement courantes.
- Par exemple, en 1956, un spécimen mesurant plus de 5 mètres a été capturé près de Lampedusa.
Depuis les années 2000 :
- Les observations se font extrêmement rares. Voici quelques cas marquants :
- 2003 : Un requin blanc a été photographié au large de Malte.
- 2008 : Une vidéo a capturé un spécimen en train de chasser dans le détroit de Messine.
- 2015 : Un individu a été repéré dans les eaux de Lampedusa.
- 2023 : Une observation confirmée au large de Porquerolles, dans le Var, a marqué un événement exceptionnel pour la France.
Ces observations sporadiques traduisent une population résiduelle, très éloignée des effectifs historiques.
Combien de requins blancs restent-ils en Méditerranée ?
Les estimations actuelles, basées sur des études scientifiques et des observations documentées, suggèrent qu’il reste moins de 250 individus adultes dans toute la Méditerranée. Ce chiffre, inquiétant, reflète un déclin constant dû à plusieurs facteurs :
- La surpêche : En Méditerranée, les captures accidentelles dans les filets de pêche industrielle sont fréquentes.
- La diminution des proies : La réduction des stocks de thons rouges et d’autres poissons de grande taille affecte directement les populations de requins.
- La pollution : Les eaux méditerranéennes, saturées de microplastiques et de métaux lourds, perturbent la chaîne alimentaire.
- Les caractéristiques biologiques de l’espèce : Le requin blanc a une maturité sexuelle tardive et un faible taux de reproduction, ce qui le rend particulièrement vulnérable.
Un rôle écologique majeur et des menaces persistantes
Le requin blanc occupe une place centrale dans l’écosystème méditerranéen en tant que super-prédateur. Il régule les populations de poissons et de mammifères marins, contribuant ainsi à l’équilibre global de la chaîne alimentaire.
Cependant, sa raréfaction entraîne des déséquilibres. L’absence de grands prédateurs favorise la prolifération de certaines espèces, menaçant l’équilibre écologique des habitats marins.
Des mesures pour protéger une espèce en danger critique
Face à la menace d’extinction, plusieurs initiatives tentent de freiner le déclin du requin blanc en Méditerranée :
- Programme de recherche : Des organisations comme Longitude 181 étudient les déplacements et les comportements de cette population.
- Réduction des captures accidentelles : La sensibilisation des pêcheurs et la mise en place de filets adaptés pourraient réduire les menaces.
- Protection des habitats : La restauration des stocks de thons rouges est essentielle pour garantir une ressource alimentaire stable au requin blanc.
Malgré ces efforts, la Méditerranée reste l’une des zones maritimes les plus exploitées et polluées au monde, compliquant la conservation.
Conclusion : un prédateur emblématique en sursis
L’apparition récente d’un requin blanc dans le Var est un rappel de la fragilité de cet écosystème et de la place unique qu’occupe cette espèce dans la Méditerranée. Cependant, le déclin alarmant de sa population illustre les pressions croissantes exercées par les activités humaines.
Préserver le requin blanc, c’est préserver l’équilibre écologique de la Méditerranée. Ce prédateur, qui a survécu pendant des millions d’années, pourrait disparaître en quelques décennies si des mesures significatives ne sont pas prises rapidement.