Environnement • 13 juin 2019
Le rahui polynésien pour protéger l’environnement
Tradition polynésienne tombée en désuétude, le rahui est aujourd'hui utilisé pour préserver l'environnement
Le Rahui ?
Le rahui est une réserve, un refuge marin ou terrestre, au sein duquel l’homme n’a pas le droit de pénétrer. Son objectif est d’offrir un répit à la faune comme la flore.
Cette pratique est progressivement tombée en désuétude au cours des siècles passés, notamment lors de l’arrivée des missionnaires occidentaux, des protestants en particulier, qui voyaient en elle un obstacle à implantation de leur religion. Puis les communautés locales s’en sont également détournées, d’abord parce que leur mode de vie s’éloignaient de plus en plus des traditions ancestrales, ensuite aussi parce que le rahui était perçu comme le symbole d’un pouvoir local. Historiquement, le rahui était en effet du ressort de clans, de chefferies ou de familles dominantes, qui jadis décidaient seuls de la mise en place d’un rahui, parfois pour protéger leur propres intérêts, même au dépends de ceux de la communauté. Quant aux puissances occidentales anglaise, américaine ou française, elles voyaient dans le rahui la survivance d’un pouvoir local antagonique aux leurs.
Le retour en grâce du rahui aujourd’hui revêt avant tout une signification environnementale, la surpêche provoquant les mêmes dégâts en Polynésie que partout ailleurs dans le monde. Le rahui du XXIe siècle marque en quelque sorte la réconciliation entre les traditions locales et le « pouvoir central », qui s’accordent pour sa mise en place.
Marier traditions locales et réglementations nationales
Mais de quoi s’agit-il exactement ? De la délimitation d’un espace protégé, dont la surface varie selon les cas. Délimité par des bouées, le rahui permet de marquer un périmètre d’interdiction. A la fois verbe, qui signifie « interdire », et nom donné à la zone protégée, le rahui sanctuarise un espace et proscrit tout prélèvement en son sein. La commune de Teahupoo, à Tahiti, a ainsi décidé la création d’un rahui de 700 hectares en 2013. Il est géré par la population locale, mais il bénéficie également de la protection juridique du code de l’environnement établi par la métropole. D’autres rahuis sont en revanche totalement locaux et existent en marge des instances de l’Etat, ce qui n’est pas sans provoquer des tensions.
Selon le Criobe, le Centre de Recherches insulaires et Observatoire de l’Environnement, la biomasse et les quantités de poissons à l’intérieur du rahui Teahupoo ont fortement augmenté, les poissons et autres les coraux venant y trouver refuge pour se protéger des prédateurs et des « nuisances » sévissant à l’extérieur du sanctuaire. Ils peuvent dès lors y grandir et s’y renouveler sans risque, à l’abri des menaces, cela pendant toute la durée du rahui. Un durée qui, historiquement, peut varier de quelques mois seulement à plusieurs années, parfois même plusieurs dizaines d’années.
A quand un immense rahui à l’échelle planétaire pour donner une chances aux espèces menacées de reprendre des forces. Pour leur permettre de survivre, tout simplement ?