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Jérôme Cordoba seul avec sa planche, en face à face avec l'horizon / Photo J. C.

Glisse 8 mai 2018

« Face à l’océan, on n’est pas au restaurant »

[LA CARTE BLANCHE de...]

... Jérôme Cordoba, surfeur, chef de projet du Bordeaux Surf Festival

Face à l’océan, nous ne sommes pas au restaurant. On ne choisit pas.

Nous sommes nombreux à partager l’amour pour l’océan mais selon son expérience, son inspiration et sa finalité, nous l’appréhendons de façon différente.
Quand on vit dans le Sud Ouest, on apprécie certains héritages: la gastronomie, la vigne, la pierre, la forêt… Pour moi, côtoyer l’océan est un privilège.
Je l’aime toute l’année mais j’ai quand même une préférence en fin d’hiver et début de printemps.Surtout s’il devient « glassy », avec une houle généreuse et régulière. Mais nous ne sommes pas au restaurant. L’essence même de la nature c’est justement de nous offrir des conditions différentes en permanence sans quoi nous ne saurions connaître, ni apprécier toutes les facettes que revêt le grand bleu. Tantôt déchaîné, tantôt calme. Tantôt ensoleillé, tantôt orageux. Tantôt marée haute et tantôt marée basse… On joue avec ce qu’il daigne nous donner, on glisse, dans son sens le plus pur, on se met debout en ayant l’impression que l’on maîtrise une vague, alors qu’on ne maîtrise qu’une trajectoire, une allure… En réalité on s’adapte, on ira plutôt à gauche ou à droite, on sera plutôt sur une petite planche ou sur une grande, on partira plutôt au large ou plutôt au bord… On s’égaie de ce que Poseïdon nous envoie du fond des abysses, on communie avec lui, on profite des embruns, on essaie d’atteindre un palier supérieur, une forme de maturité au rythme de la houle.

Sans frontière

Il est tellement grand, si puissant, immortel et sans frontières qu’il m’est incroyable de penser que certains d’entre nous puissent le traverser. Indomptable, à peine apprivoisable, je ne me permets que de l’effleurer avec ma planche, et jouer de ses reflux, de ses débris. Car oui, ce que j’aime, en fait, ce sont ses miettes. Peut être 0,01 % de son immensité : les vagues…

S’il possède un esprit, l’océan n’a même pas conscience de la terre. Car en fait, elle n’est que son fond à un moment donné. Pourtant, ce point de jonction entre la terre et l’eau, la plage, est l’endroit par lequel la totalité de l’humanité se sensibilise à la mer. Et surtout c’est ici, lorsqu’ils se rencontrent que la terre et l’eau forment les vagues. Et c’est donc ici que le surfeur s’accomplit.

« La mer est un espace de rigueur et de liberté. »
Victor Hugo

Jérôme Cordoba est engagé dans le Bordeaux Surf Festival

 Sapeur-pompier professionnel à Bordeaux, au sein de la caserne de la Benauge, il a surfé un peu partout dans le monde, dernièrement  en Europe, en Afrique et en Asie. Il surfe depuis l’âge de 15 ans. Ses spots de prédilection sont la presqu’île du Cap Ferret, et la pointe du Médoc. « Mais le top ça reste le Maroc! »