Découverte & Recherche • 25 septembre 2019
Puits de carbone : des micro-algues pour dépolluer l’air
Particules fines, poussières, gaz d’échappement, émanations… Notre environnement regorge de ces substances générées par l’activité humaine. La circulation routière, aérienne et nautique, mais aussi l’industrie, l’agriculture ou encore élevage constituent des facteurs aggravants de la dégradation de la qualité de l’air. Et dans un contexte de démographie mondiale en croissance, ce sont les questions de la santé d’une part, et de la protection de l’environnement d’autre part, qui se posent avec insistance.
Comment piéger les molécules de CO2 (dioxyde de carbone) et autres polluants émis par l’activité humaine, notamment dans les bassins urbains où leur concentration est très forte ? Face à la recrudescence de maladies respiratoires telles que l’asthme, aux villes aux façades noircies et aux rues sales, aux cours d’eau contaminés, à la faune affectée par cette surcharge, la question devient de plus en plus pressante.
La photosynthèse, au cœur du défi
Retour sur les fondamentaux, avec le principe de la photosynthèse qui garantit l’absorption du CO2. Les arbres, et de façon plus globale, les végétaux, procèdent à ce phénomène indissociable de toute vie sur Terre. Avec sa forêt humide, l’Amazonie cristallise toutes les attentions du fait de sa taille et de l’immense travail de nettoyage que réalisent ses arbres aux diverses essences. Cependant, avec une réduction de 18% de son volume depuis 1970, ce « poumon » de la planète est fragilisé, et ne peut pas faire face tout seul à l’essor global.
Quant à l’océan, c’est le deuxième poumon de notre planète : il absorbe environ 30 % du CO2 produit sur Terre ! Grâce aux phytoplanctons présents dans les eaux du globe, la photosynthèse agit et permet de récupérer le CO2 et de le stocker en eaux profondes.
Des micro-algues qui filtrent l’air !
Fortes de ce constat, les équipes de Fermentalg, société girondine spécialisée dans les micro-algues et leurs capacités de filtration, ont développé, en partenariat avec Suez, un vaste projet en relation avec la limitation de la pollution atmosphérique. Face au déséquilibre entre les acteurs de la photosynthèse (arbres, végétaux) et la production accélérée de CO2, les ingénieurs ont mis sur pied un système de puits de carbone en se basant sur le principe du biofiltre algal. Ces puits se présentent sous la forme de grandes colonnes remplies d’eau et de micro-algues en culture. Véritable mobilier urbain, c’est sous la forme de colonnes Morris que ces dispositifs se fondent dans le paysage des villes. Grâce à l’éclairage permanent réalisé par leds, c’est tout le phénomène de la photosynthèse qui s’enclenche, permettant aux micro-algues de se développer, et d’absorber non seulement le CO2, mais aussi des polluants atmosphériques, notamment les particules fines et le dioxyde d’azote (NO2). Alimentées par l’air ambiant injecté dans le puits, elles se multiplient à vive allure, jusqu’à fournir une biomasse qui sera ensuite transférée à travers le réseau d’assainissement jusqu’à la station d’épuration (actuellement à l’essai au SIAAP, Syndicat Interdépartemental d’Assainissement de l’Agglomération Parisienne). Cette biomasse subira alors un processus de transformation en énergie verte par fermentation puis par distillation. L’INERIS, Institut national de l’environnement industriel et des risques, a validé l’efficacité des puits de carbone, avec des taux d’abattement des particules fines et du CO2 oscillant entre 70 et 99%.
Avec une capacité de traitement de plusieurs mètres cubes d’air par heure, c’est l’action dépolluante d’une centaine d’arbres qui est ici reproduite. À l’image du pouvoir d’absorption des océans, ce projet scientifique met en lumière la puissance de la nature face aux exagérations de la main humaine.