Dossier • 8 juillet 2019
L’océan, au cœur de notre oxygène
L'océan est notre deuxième source d'oxygène sur Terre.
L’Amazonie, poumon de la planète… Pure vérité souvent, et à juste titre, déclamée ; mais qui dissimule trop bien l’impact fabuleux des océans sur la production d’oxygène. Certes, la végétation, au travers de la photosynthèse, constitue notre premier fournisseur d’oxygène. Les arbres, arbustes, herbes, plantes, grâce à l’énergie lumineuse et au CO2 qu’ils absorbent, nettoient l’air et synthétisent de la matière organique. Ils rejettent en échange 165 milliards de tonnes d’oxygène par an. Et pourtant… c’est oublier l’extraordinaire mission que les océans du monde prennent à bras le corps, dans le but de fournir aux êtres vivants l’oxygène nécessaire à toute vie terrienne et marine. Ces immensités, qui recouvrent 71% de la surface de notre planète, sont hôtes de minuscules organismes, les phytoplanctons (végétaux microscopiques qui vivent en suspension dans les eaux), qui à eux seuls absorbent 30 % du CO2 généré par l’Homme, et fournissent 135 milliards de tonnes d’oxygène par an, soit environ la moitié de l’oxygène présent sur Terre.
Nager en eaux froides
Pour fonctionner dans des conditions optimales, cette photosynthèse ne peut avoir lieu que dans des eaux froides, qui absorbent le CO2 pour ensuite le stocker au plus profond. C’est alors que les phytoplanctons démarrent le processus de photosynthèse, et produisent de l’oxygène. En 2015, la mission Tara-Océans publiait les conclusions de trois années de recherche sur le plancton à bord de la goélette Tara. Les scientifiques ont réalisé un séquençage précis, avec 35 000 nouvelles espèces différentes (il en existe des centaines de milliers). De quoi effectuer de nouvelles investigations sur l’impact de ces organismes sur la production d’oxygène. Or le réchauffement climatique a pour conséquence inexorable d’augmenter la température des océans. Moins efficaces pour capter le CO2, les eaux réchauffées ne fournissent plus la même quantité de dioxyde de carbone aux phytoplanctons, qui ne peuvent donc plus générer autant d’oxygène. Par endroits, les eaux sont qualifiées de « zones mortes », le taux d’oxygène étant insuffisant pour permettre une quelconque vie sous-marine. Certaines espèces de planctons ont d’ailleurs déjà commencé à migrer vers les pôles, avec un déplacement de 470 km sur 10 ans.
Un réchauffement de plus en plus menaçant
Selon John Abraham, professeur de sciences thermiques, avec une accélération du réchauffement climatique plus rapide que prévu (de l’ordre de 13%), les eaux du monde sont impactées jusqu’à 700 mètres de profondeur. Avec une élévation du niveau de la mer de 3 mm par an depuis les années 1990, c’est un véritable bouleversement qui guette l’écosystème mondial. La fonte des glaces et la dilatation thermique de l’eau constituent les principales causes de ce phénomène, qui menace de s’amplifier. Un rapport signé d’un groupe d’experts de l’ONU sur le climat (GIEC) prévoit une augmentation de 65 cm du niveau de l’eau jusqu’à la fin du XXIème siècle. Avec en ligne de mire l’engloutissement pur et simple de villes telles que Londres, Sydney ou New-York. En septembre, le GIEC remettra un nouveau rapport sur les liens entre le changement climatique, les océans et la cryosphère (SROCC), d’ores et déjà qualifié d’alarmant.
Des initiatives politiques et pragmatiques
La « COP bleue », telle est l’empreinte que le président du Chili Sebastian Pinera souhaite que la prochaine COP laisse dans les esprits. En décembre prochain, Santiago accueillera la prochaine Conférence de l’ONU sur le climat. Un ordre du jour axé autour des océans, deuxième poumon de notre planète bleue qui leur doit sa couleur et son surnom.
Pour l’heure, des initiatives axées autour de la préservation d’aires marines protégées commencent à émerger. Encouragées par les scientifiques et les ONG, elles ont le pouvoir de « redonner la vie à certaines parties de la mer en quelques décennies », selon Callum Roberts, océanographe à l’Université de York. Le concept de « carbone bleu » est également largement évoqué, mettant en avant le concept des mangroves, écosystème de marais valorisés par ailleurs pour lutter contre les brusques montées des eaux, dues notamment aux marées, sur les canaux ou aux embouchures des fleuves.
Au-delà de la production d’oxygène, c’est tout une chaîne alimentaire qui se trouve fragilisée, le plancton étant une source nutritive pour l’ensemble de l’écosystème marin. Qui à son tour nourrit le monde.