À la une • 16 octobre 2018
Le port de Bordeaux pourrait devenir régional
La région Nouvelle-Aquitaine est prête à prendre en charge sous conditions la gestion du port de Bordeaux, malgré une baisse d’activité régulière, accentuée cet été par la perte de 50% de son trafic conteneurs en raison du départ de l’armateur MSC.
« La régionalisation, on y est prêt. On est en train de s’organiser pour avoir une vue plus précise de la situation », a déclaré à Reuters le président de la région, Alain Rousset. « Je pense que la régionalisation, comme dans beaucoup d’autres domaines, est un élément de revitalisation du port. »
Le port de Bayonne, plus au sud, est déjà passé sous la tutelle de la région depuis plusieurs années.
Le Grand port maritime de Bordeaux (GPMB) est tombé ces dernières années de la 6e à la 8e place des ports français, derrière La Rochelle.
L’armateur italo-suisse MSC (Mediterranean Shipping Company) a arrêté son activité conteneurs à Bordeaux le 3 juillet. Il y a gardé son agence mais a décidé d’utiliser le réseau ferroviaire. Le retrait de MSC devrait faire perdre à Bordeaux près de 280.000 tonnes de trafic conteneurs annuel sur un total qui a atteint 550.674 tonnes en 2017.
En 2017 les conteneurs (65.000 par an) représentaient 7,58% du trafic portuaire, qui a atteint 7,2 millions de tonnes pour un chiffre d’affaires de 46 millions d’euros.
« La situation du port de Bordeaux m’inspire de l’inquiétude », dit Alain Rousset. « Globalement, je ne vois pas où est la stratégie. Or un port est un élément essentiel, non seulement des échanges mais aussi de l’activité industrielle qui peut s’y installer. »
Les entreprises implantées sur le port posent aussi la question de la stratégie et de la gouvernance. « On a une métropole en croissance, une région attractive et, paradoxalement, on a un port qui n’a pas les résultats correspondants », explique la secrétaire générale de l’Union maritime portuaire de Bordeaux (UMPB), Maud Guillerme. Selon elle, pourtant, la « communauté industrielle sur le port de Bordeaux se porte bien ».
A l’horizon 2019-2020
« Il y a des baisses structurelles et conjoncturelles, comme sur les hydrocarbures (..) et sur le maïs », ajoute-t-elle. « Mais, au fil des années, l’écart se creuse entre le tonnage et les objectifs fixés. Le diagnostic de l’Union maritime est que la stratégie du port n’est pas à la hauteur. »
Les travaux du terminal de conteneurs du Verdon, à l’embouchure de Gironde, n’ont toujours pas été effectués. Le dernier appel d’offre ayant été déclaré infructueux. Pour Maud Guillerme, il est urgent de trouver des solutions pour reprendre des parts de marché.
Louis Leuret, secrétaire général du Grand port maritime de Bordeaux, encaisse mais tient à faire une mise au point. « On a entendu toutes ces critiques. Le dialogue est nécessaire et on ne peut que l’améliorer », reconnaît-il avant de rappeler que Bordeaux est engagé dans un « projet stratégique » sur la période 2015-2020.
« Il est vrai que le port a subi une baisse de tonnage ces trois dernières années mais sur l’année 2018 on repart à la hausse avec une croissance actuelle de 2,5% », ajoute-t-il.
Il rappelle aussi que monde économique, collectivités locales et représentants de l’Etat majoritaire se retrouvent au sein des deux instances de gouvernance du port : le Conseil de surveillance et le Conseil de développement.
Un rapport d’audit a été commandé et le préfet a été chargé d’une mission de concertation.
Pour Alain Rousset, les enjeux d’un transfert de compétence de l’Etat vers la région sont « le développement économique et industriel, l’innovation, l’implantation de nouvelles activités, l’amélioration de la chaîne logistique pour faciliter le report modal » ainsi que l’enjeu financier.
« Il faut que l’Etat continue de participer ou délègue à la région les crédits pour le dragage (14 millions d’euros par an) et les investissements sur le port », explique-t-il.
La région pose aussi comme conditions la garantie de neutralité financière dans le temps et l’élaboration d’une stratégie partagée avec les autres collectivités, Bordeaux Métropole, la Chambre de commerce, les milieux économiques.
« Il y a un travail à faire d’environ une année, peut-être moins. On peut aboutir fin 2019-début 2020 », sachant que la décision revient à l’Etat, souligne Alain Rousset.